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L'art populaire de la Russie

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Le plume de Finist-Fier-Faucon


I


I était une fois un vieux qui avait trois filles. Les deux aînées, très coquettes, ne pensaient qu'à se parer, tandis que la plus jeune s'occupait du ménage. Habile en tout, ayant l'œil à tout et, avec ça, d'une beauté qu'un conte ne saurait dire, qu'une plume ne peut décrire: yeux d'eau marine, sourcils de zibeline et la blonde tresse, orgueil de la jeunesse, tombant jusqu'aux talons.
  Comme le père devait se rendre à la foire, il demanda :
  - Quel cadeau faut-il vous ramener de la ville, mes filles?
  L'aînée voulait de la soie cramoisie pour une robe, la seconde de la soie azurée. Et la troisième dit:
  - Achète-moi, père, une plume de Finist-Fier Faucon!
  Mais à la foire personne n'avait jamais entendu parler d'une plume comme ça. Et le vieux rentra à la maison avec des cadeaux pour ses aînées, les mains vides pour sa préférée:
  - Je n'ai pas trouvé ce que tu désirais, ma fille chérie!
  - Tant pis, père! Ce sera pour la prochaine fois.-
  Les sœurs aînées taillent les soies, cousent des robes neuves, se moquent de la plus jeune qui ne dit rien.
  Une autre fois le père s'en va en ville. Les aînées demandent qu'il leur rapporte des châles à fleurs. La plus jeune dit encore:
  - Achète-moi une plume de Finist-Fier Faucon!
  Le père chercha dans toute la ville, ne trouva rien. Il revint à la maison avec les châles des aînées et dit à la plus jeune:
  - Je n'ai pas trouvé ton cadeau, ma fille chérie!
  - Ça ne fait rien, père! On sera plus heureux une autre fois.
  Pour la troisième fois le vieux alla à la foire. Les sœurs aînées désiraient des pendants d'oreille. Et la plus jeune:
  - Achète-moi, père, une plume de Finist-Fier Faucon!
  Le vieux acheta de beaux pendants en or, mais fouilla en vain éventaires et boutiques, nul ne connaissait cette plume-là. Il revenait tout triste à la maison quand, au sortir de la ville, il rencontra un petit vieux qui portait une petite boîte.
-  Qu'est-ce que tu tiens là, vieux ?
-  C'est une plume de Finist-Fier Faucon.
-  Et tu en demandes cher?
-  Ni trop ni trop peu, juste ce que ça vaut. Mille roubles! Le père paya sans marchander et, rentré à la maison, remit la petite boîte à la plus jeune des filles:
  - Enfin, j'ai trouvé cadeau à ton goût, ma fille chérie!
   La belle sauta de joie, serra la boîte sur son cœur. Et le soir venu, elle s'enferma dans sa chambre, prit la plume et la jeta sur le sol en disant:
  - Apparais, Finist-Fier Faucon! Viens, mon beau promis tant désiré!

V.Groudinin et L.Matakova "Alionouchka*

V.Groudinin et L.Matakova "Alionouchka"
Boîtier. 1980   Les émaux de Rostov

   Aussitôt un jeune et beau tsarévitch se dressa devant elle. Elle en fut d'abord apeurée, mais il lui sourit gentiment, lui prit la main doucement, lui parla tendrement et, toute rassurée, elle causait avec lui quand ses sœurs les entendirent :
   - A qui fais-tu la conversation, petite sœur?
   - A personne. Je me parle à moi-même.
   - C'est bien vrai? Ouvre donc ta porte!
   Finist-Fier Faucon frappa le sol, se changea en plume bigarrée que la jeune fille remit dans la boîte avant d'ouvrir à ses sœurs. Elles ont fureté partout, n'ont rien vu. Et après leur départ, le tsarévitch reprit sa forme humaine.
   Au lever du jour, Finist-Fier Faucon embrassa la jeune fille:
   - Chaque nuit je viendrai à ton appel, mon aimée ! Et si tu as envie de riches parures, belles vêtures, sors sur le seuil, fais signe à droite avec ma plume et tu auras ce que ton cœur désire. Quand tu feras signe à gauche, tout disparaîtra.
   Il l'embrassa encore, se changea en faucon et s'envola par la fenêtre, au-dessus de la sombre forêt. Et chaque nuit, désormais, Finist-Fier Faucon vint chez la jeune fille pour ne s'envoler qu'au matin.
   Arriva le dimanche. Les sœurs aînées s'habillaient pour aller à l'église, mettaient les robes neuves, nouaient les châles fleuris, attachaient les pendants dorés et se moquaient de la cadette:
   - Tu n'as rien de neuf, rien de beau à te mettre ! Reste donc là, avec ta petite plume!
   - Ça ne fait rien, je suis bien à la maison.
   Mais une fois tout le monde parti, la jeune fille vint sur le seuil et fit signe à droite de sa plume bigarrée. Un carrosse de cristal apparut, de pur-sang attelé, avec des valets dorés-parés qui lui présentaient une robe magnifique, une parure de princesse, des bijoux de reine. La jeune fille s'habilla, monta dans le carrosse et s'en alla à l'église.
   Quand elle arriva sur le parvis, les gens en furent éblouis ; quand dans l'église elle entra, devant elle la foule s'écarta: "C'est une princesse d'au-delà des mers!" chuchotait-on. Certains voulaient la suivre, mais elle partit avant la fin de l'office et si vite que per­sonne ne sut de quel côté elle allait.
   Sitôt à la maison, la jeune fille se dévêtit et fit signe à gauche de la plume. Robe et parures, chevaux et voiture, tout disparut. Alors, dans sa vieille robe de rien, elle s'assit à la fenêtre, comme une qui n'a pas bougé.
   Ses sœurs, en rentrant, ne parlaient que de la princesse:
   - Si richement habillée, si bellement parée! Et d'une beauté qui ne se peut raconter! Dire que tu n'en as rien vu!
   - Ça ne fait rien, mes sœurs. Vous m'avez si bien tout expliqué que je crois y avoir été moi-même!
   Le dimanche suivant ce fut la même chose, et tout pareil le dimanche d'après. Mais le troisième dimanche elle oublia une épingle de diamant dans ses cheveux et ses sœurs, comme de juste, la remarquèrent:
   - Mais on dirait le même bijou que celui que portait ce matin la princesse! Où l'as-tu pris, qui te l'a donné?
   La jeune fille s'exclama, courut dans sa chambre ôter l'épingle, mais le mal était fait. Ses sœurs se méfiaient, la questionnaient, l'espionnaient. Une nuit qu'elles l'entendaient parler avec Finist-Fier Faucon, elles réveillèrent leur père:
   - Vite, père! Chaque nuit quelqu'un vient dans la chambre de notre sœur et il y est encore maintenant!
   Le père y courut mais ne trouva personne, Finist-Fier Faucon s'était déjà changé en plume. Et le vieux tança ses filles :
   - Mauvaises langues!  Au lieu de calomnier votre sœur, vous feriez mieux de surveiller votre propre conduite.
   Les aînées, dans leur dépit, n'en guettèrent que mieux la cadette. Et elles finirent par voir le faucon qui, le soir, volait vers la chambre de leur jeune sœur, n'en partait qu'au petit matin. Alors, elles choisirent le bon moment, à la fenêtre se hissèrent secrètement, de couteaux hérissèrent les montants, plantèrent des aiguilles acérées tout autour de la croisée.
   A la nuit tombée quand Finist-Fier Faucon voulut entrer chez son amie, il ne réussit qu'à se blesser cruellement. La jeune fille dormait et n'avait rien entendu
   Et le faucon cria:
   - Adieu, ma beauté! Si tu veux me revoir cherche-moi au-delà de vingt-neuf pays, dans le trentième royaume. Quand tu auras trou trois paires de soulier de fer, usé trois bâtons de fonte, rongé trois pains de' pierre, alors peut-être, tu me retrouveras. Pas avant!



B.Kiselev "Contes russes"
Baguier. 1999.  Kholouï

   La belle entendait ses dures paroles à travers son sommeil, mai; ne pouvait se réveiller. Ce n'est qu'au matin, en voyant sa fenêtre des couteaux barrée, d'aiguilles hérissée, de sang rouge tâchée qu'elle a comprit  tout et se mit à pleurer:
   - Ce sont mes sœurs qui ont voulu faire périr mon ami!
   La jeune fille sanglota, se lamenta. Elle passa des nuits sans dormir, des jours sans manger, à se désoler. Elle essaya bien d'agiter la plume bigarrée, d'appeler son bien-aimé. Mais Finist-Fier Faucon ne venait ni n'envoyait ses serviteurs. Et la jeune fille demanda à son père de la laisser partir au loin. Malgré son chagrin, le père le permit. Alors elle se fit forger trois paires de souliers de fer, trois bâtons de pèlerin en fonte. Elle chaussa une paire de souliers, prit dans la main un bâton, emporta trois pains de pierre et se mit en route vers la sombre forêt, du côté d'où arrivait Finist-Fier Faucon.
   Elle marcha longtemps, du ponant au levant, traversa les fleuves rapides, les sables arides, les forêts profondes, les hautes montagnes. La première paire de souliers de fer se trouait, le premier bâton de fonte s'usait, le premier pain de pierre était rongé. Au plus profond de la forêt, au plus épais des taillis la jeune fille vit une hutte: sous les arbres nichée, sur pattes de poulet perchée et qui virait dé-ci, dé-là. La jeune fille dit :
   - Hutte-chaumine, ne me fais pas grise mine, tourne-toi dos aux bois, face à moi! Chez toi je veux monter, de ton pain-sel goûter.
   La hutte tourna, la jeune fille entra. Là-dedans habitait la vieille sorcière Baba-Yaga, jambe ossue, dos bossu, lippe comme une auge, nez long d'une aune. Baba-Yaga renifla:
   - Pff, pff!... Dans les temps jadis, on ne sentait jamais l'odeur de Russe par ici! Et voilà que l'odeur russe par le monde se promène, dans ma maison traîne, à plein nez m'enchifrène! Que fais-tu là, jeune fille? Tu éprouves ton courage ou tu fuis l'ouvrage?
   - J'avais un fiancé, grand-mère, Finist-Fier Faucon, plumes bigarrées. Mes sœurs l'ont maltraité, il est parti et je le cherche.
   - Eh bien, tu n'es pas au bout de tes peines, jeune fille! Finist-Fier Faucon habite au bord de la mer bleue, à vingt-neuf pays d'ici, dans le trentième royaume. Et il est déjà fiancé à une princesse. Mais je vais essayer de t'aider.
   La vieille s'empressait, de la jeune fille s'occupait. Elle la fit boire-manger, la mena se coucher. Puis au matin, la réveilla avant le soleil, lui remit un riche présent - un fuseau d'or et une quenouille d'argent. Et Baba-Yaga lui fit la leçon:
   - Maintenant tu vas aller chez ma grande sœur, elle te sera de bon conseil. En attendant, prends mon cadeau. Quand avec cette quenouille tu files du lin, c'est un fil d'or qui vient. Une fois au bord de la mer bleue, mets-toi à filer.  La fiancée de Finist-Fier Faucon viendra se prome­ner, elle voudra t'acheter mon petit cadeau. Mais toi, n'accepte rien, demande seulement à voir Finist-Fier Faucon!
   Baba-Yaga prit une pelote de fil et la lança sur le chemin en disant:
   - Suis-la partout, elle te guidera!
   La jeune fille la remercia et suivit la pelote.
   La pelote roule, le temps coule. La seconde paire de souliers va se trouer, le second bâton de fonte va s'user, le second pain de pierre va être rongé. La forêt se fait plus sombre, les taillis plus épais, les arbres de leur cime étayent le ciel. Au cœur de la forêt, au plus profond des fourrés, la pelote s'arrêta devant une hutte: sous les branches nichée, sur pattes de poulet perchée et qui virait dé-ci, dé-là. La jeune fille dit:
   - Hutte-chaumine, ne me fais pas grise mine, tourne-toi dos aux bois, face à moi! Chez toi je veux monter, de ton pain-sel goûter.
   La hutte tourna, la jeune fille entra. Il y avait là une sorcière plus vieille que la pre­mière, Baba-Yaga, jambe ossue, dos bossu, lippe comme une auge, nez long d'une aune. Elle renifla:
   Pff, pff !... Dans les temps jadis, on ne sentait jamais l'odeur de Russe par ici. Et voilà que l'odeur russe par le monde se promène, dans ma maison traîne, à plein nez m'enchifrène! Que fais-tu là, jeune fille ? Tu éprouves ton courage ou tu fuis l'ouvrage?
   - Je cherche mon fiancé, grand-mère, Finist-Fier Faucon, plumes bigarrées. Mes sœurs lui ont fait du mal et il est parti.
   - Hélas, jeune fille! Ton Finist-Fier Faucon va se marier, ce soir-même on fête les accordailles. Mais je vais essayer de t'aider quand même.
   La vieille s'empressait, de la jeune fille s'occupait. Elle la fit boire-manger, la mena se coucher. Puis, avant l'aube la réveilla, lui remit un riche présent - un œuf d'or, une soucoupe d'argent. Et lui fit la leçon:
   - Tu vas aller chez ma sœur aînée, elle te sera de bon conseil. En attendant, prends ce cadeau. Une fois au bord de la mer bleue, fais rouler l'œuf sur la soucoupe. La fiancée de Finist-Fier Faucon voudra te l'acheter, toi, tu refuseras. N'accepte rien, demande seulement à voir Finist-Fier Faucon.
   La jeune fille la remercia et repartit en suivant la pelote.
   La pelote roule, le temps coule. La troisième paire de souliers de fer s'est trouée, le troisième bâton de fonte s'est usé, le troisième pain de pierre a été rongé. Au fin fond des forêts obscures, au plus épais des taillis impénétrables la pelote s'arrêta devant une hutte; sous les arbres nichée, sur pattes de poulet perchée et qui virait dé-ci, dé-là. La jeune fille dit :
   - Hutte-chaumine, ne me fais pas grise mine, tourne-toi dos aux bois, face à moi ! Chez toi je veux monter, de ton pain-sel goûter.
   La hutte tourna, la jeune fille entra. Il y avait là une sorcière bien plus vieille que les deux autres, Baba-Yaga, jambe ossue, dos bossu, lippe comme une auge, nez long d'une aune. Elle renifla:
   - Pff, pff!... Dans les temps jadis, on ne sentait jamais l'odeur de Russe par ici. Et voilà que l'odeur russe par le monde se promène, dans ma propre maison traîne, à plein nez m'enchifrène! Que fais-tu là, jeune fille ? Tu éprouves ton courage ou tu fuis l'ouvrage?
   - J'avais un fiancé, grand-mère, Finist-Fier Faucon, plumes bigarrées. Mes sœurs ont voulu le faire périr et il s'est envolé par-dessus forêts et montagnes, par delà vingt-neuf pays, dans le trentième royaume. Et depuis ce temps je le cherche.
   - Ah, pauvre de toi, jeune fille ! Finist-Fier Faucon a épousé la princesse pas plus tard qu'hier. Mais je vais essayer de t'aider quand même !
   La vieille s'empressait, de la jeune fille s'occupait. Elle la fit boire-manger, la mena se coucher. Et le lendemain, avant le jour la réveilla, lui donna un riche présent - un métier à broder d'or et une aiguille d'argent, avec de bons conseils par-dessus le marché:
   - En arrivant au bord de la mer bleue, prends ce métier, l'aiguille va broder toute seule. La princesse voudra t'acheter mon petit cadeau, mais tu n'accepteras rien. Demande seulement à voir Finist-Fier Faucon.
   La jeune fille la remercia et suivit la pelote.



B.Kiselev "Contes russes"
Baguier. 1999.  Kholouï

   La pelote roule, le temps coule. La troisième paire de souliers de fer s'est trouée, le troisième bâton de fonte s'est usé, le troisième pain de pierre a été rongé. Au fin fond des forêts obscures, au plus épais des taillis impénétrables la pelote s'arrêta devant une hutte; sous les arbres nichée, sur pattes de poulet perchée et qui virait dé-ci, dé-là. La jeune fille dit:
   - Hutte-chaumine, ne me fais pas grise mine, tourne-toi dos aux bois, face à moi ! Chez toi je veux monter, de ton pain-sel goûter.
   La hutte tourna, la jeune fille entra. Il y avait là une sorcière bien plus vieille que les deux autres, Baba-Yaga, jambe ossue, dos bossu, lippe comme une auge, nez long d'une aune. Elle renifla:
   - Pff, pff!... Dans les temps jadis, on ne sentait jamais l'odeur de Russe par ici. Et voilà que l'odeur russe par le monde se promène, dans ma propre maison traîne, à plein nez m'enchifrène ! Que fais-tu là, jeune fille ? Tu éprouves ton courage ou tu fuis l'ouvrage?
   - J'avais un fiancé, grand-mère, Finist-Fier Faucon, plumes bigarrées. Mes sœurs ont voulu le faire périr et il s'est envolé par-dessus forêts et montagnes, par delà vingt-neuf pays, dans le trentième royaume. Et depuis ce temps je le cherche.
   - Ah, pauvre de toi, jeune fille ! Finist-Fier Faucon a épousé la princesse pas plus tard qu'hier. Mais je vais essayer de t'aider quand même !
   La vieille s'empressait, de la jeune fille s'occupait. Elle la fit boire-manger, la mena se coucher. Et le lendemain, avant le jour la réveilla, lui donna un riche présent - un métier à broder d'or et une aiguille d'argent, avec de bons conseils par-dessus le marché:
   - En arrivant au bord de la mer bleue, prends ce métier, l'aiguille va broder toute seule. La princesse voudra t'acheter mon petit cadeau, mais tu n'accepteras rien. Demande seulement à voir Finist-Fier Faucon.
   La jeune fille la remercia et suivit la pelote.
   Le temps coule, la pelote roule. La forêt se fait moins sombre, les arbres moins hauts, les taillis moins épais. Au bout de la longue route, au bout de la longue peine apparaît la mer bleue. Au loin des murs blancs s'élèvent, des coupoles d'or au soleil brillent - c'est le royaume de Finist-Fier Faucon, sa belle capitale!
   La jeune fille au bord de l'eau s'en allait, sur le sable blanc s'installait, prenait la quenouille en main, se mettait à filer le lin. Sur la quenouille - du lin, sur le fuseau - un fil d'or fin! De voir cette merveille les gens s'ébahissent, les gamins s'ébaubissent, les vieux n'en croient pas leurs yeux.
   La princesse que Finist-Fier Faucon avait épousée sortit se promener avec ses nour­rices-gouvernantes, ses fidèles suivantes. Elle vit quenouille et fuseau, désira les acheter aussitôt. Mais la fileuse ne voulait rien entendre, refusait de vendre:
-  - C'est un cadeau. Et un présent ne s'achète ni ne se vend. Mais si tu me laisses voir Finist-Fier Faucon, je te donnerai quenouille et fuseau pour rien!
   La princesse se fâcha d'abord, puis elle réfléchit et dit:
  - C'est bon! Donne-moi ta quenouille d'argent et ton fuseau d'or. Cette nuit tu pourras voir Finist-Fier Faucon.
   Au repas du soir, la princesse mêla de l'herbe qui fait dormir dans la boisson de son époux. Et quand il s'endormit profondément, elle dit à ses servantes de conduire la jeune fille auprès de lui.
   En voyant son bien-aimé endormi, la jeune fille voulut l'éveiller. Elle l'implora, le supplia:
  - Réveille-toi, Finist-Fier Faucon! Ouvre les yeux, mon doux ami! Des jours et des mois je t'ai cherché, à grand-peine t'ai retrouvé. J'ai troué trois paires de souliers de fer, j'ai usé trois bâtons de fonte, j'ai rongé trois pains de pierre en venant vers toi. J'ai traversé les fleuves rapides, les sables arides, les forêts profondes, les hautes montagnes pour te revoir, mon bien-aimé!
   Mais Finist-Fier Faucon dormait, n'ouvrait pas les yeux. Toute la nuit la jeune fille se lamenta en vain, et au matin, la princesse la fit chasser par ses servantes.
   En se réveillant, Finist-Fier Faucon dit :
  - Quelle longue et mauvaise nuit j'ai passée ! Il me semblait que quelqu'un pleurait à mes côtés, et je ne pouvais me réveiller, et j'en avais une telle peine! Tu as rêvé, dit la princesse. Personne n'est venu ici.
   La jeune fille, entre-temps, allait s'asseoir sur le sable blanc, prenait la soucoupe d'argent, faisait rouler dessus l'œuf d'or. La princesse vint en promenade et voulut acheter le joli jouet. Mais la jeune fille répondit:
  - Un présent ne s'achète ni ne se vend. Laisse-moi voir Finist-Fier Faucon et je te le donnerai pour rien!
   La princesse accepta. Le soir, elle versa de l'herbe qui fait dormir dans le verre de son époux et quand le sommeil le prit, fit venir la jeune fille. Celle-ci pleura et supplia toute la nuit sans pouvoir réveiller Finist-Fier Faucon. Et au matin, la princesse la fit chasser par ses servantes.
   En se réveillant, Finist-Fier Faucon soupira:
  - Quelle longue et pénible nuit j'ai passé! Il me semblait que quelqu'un pleurait et m'appelait, et je ne pouvais ouvrir les yeux et j'en avais tant de chagrin! Ce n'était qu'un rêve, dit la princesse. Il n'y avait personne.
   Plus désolée que jamais, plus triste qu'avant, la jeune fille allait s'asseoir sur le sable blanc, prenait le métier d'or et l'aiguille d'argent se mettait à broder toute seule. L'aiguille court sur la soie, trace des dessins dorés à points perlés, et en voyant cette merveille les gens s'ébahissent, les enfants s'ébaubissent, les vieux n'en croient pas leurs yeux!
   La princesse sortit se promener avec ses nourrices-gouvernantes, ses fidèles suivantes. Elle demanda à acheter Faiguille-brodeuse, mais la jeune fille ne voulut rien entendre, refusa de vendre:
  - Un présent ne s'achète ni ne se vend. Mais laisse-moi voir Finist-Fier Faucon et je te le donnerai pour rien!
   La princesse accepta tout de suite. Au repas du soir elle versa de l'herbe qui fait dormir dans la boisson de son époux. Et quand il s'endormit profondément fit venir la jeune fille dans sa chambre.
  La jeune fille se pencha sur son ami, le supplia:
  - Réveille-toi, Finist-Fier Faucon! Ouvre les yeux, mon doux ami! Des jours et des mois je t'ai cherché, à grand-peine t'ai retrouvé. J'ai troué trois paires de souliers de fer, usé trois bâtons de fonte, rongé trois pains de pierre en venant vers toi. J'ai traversé les fleuves rapides, les sables arides, les forêts profondes, les hautes montagnes. Tout ça, pour te revoir, mon bien-aimé!
   Mais Finist-Fier Faucon dormait, n'ouvrait pas les yeux. Alors, comme le jour allait se lever, comme on allait bientôt la chasser, la jeune fille se mit à pleurer à chaudes larmes en embrassant Finist-Fier Faucon. Et une de ces larmes tomba sur la joue du tsarévitch, le brûla comme au fer rouge. Finist-Fier Faucon tressaillit, ouvrit les yeux et reconnut jeune fille.
   Ce fut bonheur indicible, joie indescriptible! Ils se prenaient par les mains, se disaient des mots câlins, oubliaient tous leurs chagrins. La jeune fille raconta tout à Finist-Fier-Faucon: comment ses sœurs jalouses voulaient le tuer, comment par le monde elle avait vagabondé, comment à la princesse elle l'avait marchandé. Et en l'écoutant, Finist-Fier-Faucon l'aima encore davantage.
   Il fit venir princes et boyards, citadins et campagnards, artisans-marchands et ge: de tout rang et leur parla ainsi:
  - A vous de juger, à vous de décider ! Avec qui dois-je vivre, avec qui dois-je finir mes jours : avec la femme qui me vendait ou avec celle qui me rachetait ? Avec celle q par amour de moi par mille peines est passés ou avec celle qui contre des babioles d'i m'échangeait ?
   Princes et boyards, citadins et campagnards, artisans-marchands et gens de tout rang après avoir médité et discuté, jugé et délibéré, d'une seule voix ont décidé:
  - C'est avec la femme qui l'a cherché et retrouvé, aimé et racheté que Finist-Fier Faucon doit vivre. C'est avec elle qu'il doit finir ses jours!
   Alors les trompettes ont sonné, les canons ont tonné annonçant le mariage de Finist-Fier Faucon avec la belle jeune fille, sa fidèle amie. Et ils vécurent jusqu'à leur dernière heure dans le contentement et le bonheur.

 





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II était une fois un vieux qui avait trois filles. Les deux aînées, très coquettes, ne pensaient qu'à se parer, tandis que la plus jeune s'occupait du ménage.
  















  

Qu'est -ce que tu tiens là, vieux ?
-  C'est une plume de Finist-Fier Faucon.
-  Et tu en demandes cher?
-  Ni trop ni trop peu, juste ce que ça vaut.
  














  

 Finist-Fier Faucon frappa le sol, se changea en plume bigarrée que la jeune fille remit dans la boîte avant d'ouvrir à ses sœurs.
  















  

Alors elle se fit forger trois paires de souliers de fer, trois bâtons de pèlerin en fonte. Elle chaussa une paire de souliers, prit dans la main un bâton, emporta trois pains de pierre et se mit en route vers la sombre forêt, du côté d'où arrivait Finist-Fier Faucon..
  















  

La hutte tourna, la jeune fille entra. Là-dedans habitait la vieille sorcière Baba-Yaga, jambe ossue, dos bossu, lippe comme une auge, nez long d'une aune
  















  

La pelote roule, le temps coule. La seconde paire de souliers va se trouer, le second bâton de fonte va s'user, le second pain de pierre va être rongé. La forêt se fait plus sombre, les taillis plus épais, les arbres de leur cime étayent le ciel. A
  















   uenouille d'argent. Et Baba-Yaga lui fit la leçon:
   - Maintenant tu vas aller chez ma grande sœur, elle te sera de bon conseil. En attendant, prends mon cadeau.
  















  

La hutte tourna, la jeune fille entra. Il y avait là une sorcière bien plus vieille que les deux autres, Baba-Yaga, jambe ossue, dos bossu, lippe comme une auge, nez long d'une aune.
  














  

Le temps coule, la pelote roule. La forêt se fait moins sombre, les arbres moins hauts, les taillis moins épais. Au bout de la longue route, au bout de la longue peine apparaît la mer bleue.
  















  

Au loin des murs blancs s'élèvent, des coupoles d'or au soleil brillent - c'est le royaume de Finist-Fier Faucon, sa belle capitale!
  















  

La jeune fille, entre-temps, allait s'asseoir sur le sable blanc, prenait la soucoupe d'argent, faisait rouler dessus l'œuf d'or. La princesse vint en promenade et voulut acheter le joli jouet.
  















  

Ce fut bonheur indicible, joie indescriptible! Ils se prenaient par les mains, se disaient des mots câlins, oubliaient tous leurs chagrins